Si l’histoire est condamnée à se répéter, alors la situation de l’énergie au Canada en 2015 a un air de déjà-vu datant des années 1980.
La politique énergétique nationale de Pierre Trudeau a forcé l’Ouest canadien à vendre ses ressources naturelles sous les prix du marché au reste du Canada. La politique des années 1980 représentait un transfert massif d’une partie du pays vers d’autres régions. Les bénéfices sont demeurés au Canada et le gouvernement fédéral a conservé les revenus de taxes, mais l’iniquité provenait du fait qu’une seule région payait les coûts.
Aujourd’hui, tant le gouvernement fédéral que celui de certaines provinces mettent en place des politiques qui obligent l’Ouest à vendre son pétrole et son gaz aux États-Unis pour beaucoup moi que les prix mondiaux. Chaque année, nous envoyons environ 30 milliards de dollars en richesse et 8 milliards de dollars en taxes et redevances du Canada vers les États-Unis. Il s’agit d’un problème made-in Canada qui prend des proportions historiques.
Depuis 2008/09, les États-Unis ont révolutionné le monde en changeant le paradigme global de l’énergie. Ils l’ont fait en améliorant techniquement une vieille technologie. Ils ont réussi à nourrir leur relance économique et à se sortir de la crise financière, tout en étant le seul pays du G20 à atteindre ses cibles dans le cadre du Protocole de Kyoto. Plusieurs commentateurs appellent maintenant la fracturation hydraulique une « technologie verte » pour ces raisons.
C’est aussi la raison pour laquelle les États-Unis ont beaucoup moins besoin de notre plus important produit d’importation : l’énergie. C’est pourquoi les infrastructures de notre politique des années 1950 sont obsolètes. Nous avons mis tous nos œufs dans le panier américain en construisant nos pipelines vers le mid-Ouest, au lieu de les développer vers nos ports de mer. Conséquence : nous en payons maintenant le prix ou plutôt, nous ne recevons pas notre juste prix.
Le fait que les producteurs canadiens ne reçoivent pas les prix du marché est bien pire que la chute de ces prix en tant que tels. Si nos produits pétroliers et gaziers s’exportaient par les mers, nous recevrions au moins les mêmes prix que la Norvège et le Nigéria. Nous pourrions alors conpétitionner de manière juste et équitable. C’est cette histoire qui ne nous ai jamais racontée. Pourtant, c’est la vérité.
En 1980, le premier ministre albertain Lougheed se demandait dans un discours « Pourquoi le pétrole de l’Alberta? Pourquoi pas la foresterie de la Colombie-Britannique? Pourquoi pas une taxe sur l’exportation de la potasse de Saskatchewan, du nickel du Manitoba ou des pâtes et papier du Québec et de l’Ontario? Pourquoi le pétrole albertain? »
En 2015, nous serions en droit de nous poser les mêmes questions au sujet de notre politique énergétique et du moratoire sur les pétroliers sur la côte Ouest. Sauf que cette fois-ci, nous devrions aussi demander pourquoi nous donnons les bénéfices à un pays étranger tandis que nous avons un déficit intérieur qui va en grandissant. Nous serions aussi en droit de nous interroger pourquoi les Canadiens ne sont pas plus en colère devant une telle situation.