La question : « demeureriez-vous près d’un puits de gaz ? » a pour but d’être une question piège. Elle sous-entend que les gens de l’industrie du pétrole et du gaz, qui évidemment sont à même de comprendre leur propre secteur d’activité, ne voudraient jamais vivre près d’un puits de pétrole ou de gaz. Il s’agit d’un autre exemple de l’incompréhension de notre industrie qui est véhiculé et qui se perpétue au Québec et ailleurs.
On m’a posé cette question des dizaines de fois. Au cours d’une discussion civilisée, mon interlocuteur, pour prouver son point, me pose la question rhétorique ultime : « Et vous, demeureriez-vous près d’un puits de gaz ? ».
La première fois que la question m’a été posée, je l’ai naïvement prise comme une vraie question et j’ai simplement répondu : « bien sûr! ». Il m’a fallu un peu plus de temps avant de me rendre compte que l’interrogateur pensait qu’il connaissait déjà la réponse. Ceci m’a déconcerté. Non pas par la façon de répondre à la question qui s’avérait être simple depuis le début, mais plutôt par la façon dont j’allais convaincre mes interlocuteurs que leur croyance était tout simplement fausse.
J’ai eu l’occasion de démontrer mon point lors d’une conversation informelle dont j’ai été témoin au Stampede de Calgary cette année. Au cours de cette conversation, le pdg d’une société pétrolière et gazière junior a dit au second : « J’ai vu que vous forez dans la formation du cardium (pétrole de schiste) dans notre région ». Le second a alors répondu : « nous sommes en train de forer sous votre maison ».
Le premier vit à Bearspaw, une luxueuse localité dotée de grands espaces en banlieue de Calgary. Il n’a reçu aucune compensation. Ça ne le dérange pas le moins du monde que des puits forés horizontalement et fracturés sur plusieurs sections soient à proximité et sous sa maison de plusieurs millions de dollars. Pourquoi le serait-il, ils sont à deux kilomètres de profondeur.
À la suite de cette conversation, j’ai suggéré d’ajouter Bearspaw à l’itinéraire de la récente Tournée des agriculteurs, qui était très réussie d’ailleurs. Les agriculteurs du Québec, ou d’ailleurs, ont alors pu constater de leurs propres yeux qu’il n’est pas de notre intention de leur imposer quelque situation que ce soit que nous n’accepterions pas nous-mêmes.
Alors maintenant, la prochaine fois qu’on me demandera si je demeurerais près d’un puits de gaz, je serai en mesure d’affirmer que oui, je le pourrais. Une grande partie des cadres dans l’industrie du pétrole et du gaz à Calgary le font réellement. Et si vous ne me croyez pas, vous pouvez le demander à l’un des participants de la Tournée des agriculteurs, qui, après la tournée, ont aussi affirmé qu’ils pouvaient vivre près d’un puits eux aussi.